De la terre sous les griffes | recherche-création en cours, 2024
Dans ce récit, il y a d’abord des souvenirs.
Celui de promenades dans les bois en bord de mer, à 5 ans, lorsque j’intimais le silence à mes parents parce que « mes lapins dorment ». Celui où les lapins des voisins s’étant échappés du clapier, et où nous – les enfants du village – étions accourus au dehors pour tenter de les capturer, alors qu’un orage éclatait ; nous nous retrouvions trempés de pluie et de boue, les vêtements souillés, les membres écorchés par les hautes herbes, le regard noyé, criant et riant de ressentir les éléments et d’en faire partie, laissant finalement les animaux retourner au sauvage. Celui où, après avoir pleuré à la mort de la maman de Bambi devant l’énorme télévision à tube cathodique du salon familial, je m’émerveillais devant l’énergie de son acolyte Panpan. Celui où ma mère me lisait Pierre Lapin au coin de mon lit en bois, avant de m’endormir le soir. Celui de ce jour où j’entendis les cris sifflants des mêmes animaux sous la lame du voisin, suivi du moment où il me montra leurs carcasses scalpées pendues par les pattes arrière aux poutres de la grange, et le seau dans lequel il avait jeté leurs yeux, ressemblant à des amas de chair informes collés à des billes grisâtres – je faillis vomir et dès ce jour, je ne mangeai plus jamais de lapin. Ceux où lors de nombreuses promenades, une paire d’oreilles émergeait au bord du chemin, puis disparaissait dans les fourrés aussi vite. Celui du récit d’une garenne aux innombrables aventures initiatiques, aux guerres de clans et aux peurs animales de Watership Down, que je lus une fois adulte, avec le même appétit que les récits fantastiques de mon adolescence.
Ce récit tentera de révéler la fabrique de cette relation, de ce lien au vivant.
Ce projet de recherche-création voit le jour avec le soutien de La Métive, lieu international de résidence de création artistique.