Démarche
Solastalgie
Je suis photographe plasticien, et depuis 2020, j’ai entamé un corpus artistique intitulé Solastalgie, néologisme décrivant la douleur morale causée par la perte irréparable des écosystèmes d’un territoire, construit avec le latin sōlācium (confort) et le grec algia (douleur). Ce projet de création se motive par mon intérêt sur les questions de biodiversité et de rapport complexe qu’entretient l’humain avec la nature, mon propos artistique étant nourri par des faits scientifiques. C’est aussi un moyen d’extérioriser mes propres émotions face aux crises environnementales.
Les techniques photographiques sont le médium principal de mon travail, je les détourne dans des travaux à mi-chemin entre le documentaire et la recherche plastique. Je cherche à dévoiler le réel en m’éloignant des procédés classiques du genre.
J’explore ainsi des techniques alternatives à la pratique argentique. Je travaille avec de la matière vivante, la photosynthèse des végétaux et des techniques moins toxiques pour les organismes telles que le cyanotype ou l’anthotype, en les appliquant sur des bio-membranes, ou du tissu.
Ce travail repose sur une exploration poétique et plastique, de la perte du lieu physique, palpable, celui qui est directement impacté par ces menaces environnementales, et le paysage intérieur des individus confrontés à cette perte. Lui aussi se dévaste, solitairement souvent, au gré d’une nostalgie d’un futur qui s’étiole. Faire émerger un travail sur cette notion et l’impact émotionnel qu’elle induit participe à une approche de compréhension de ce mécanisme et de formalisation visuelle de ces sentiments.
Au sein de ce corpus de travail naissent une recherche artistique et plusieurs séries d’œuvres, chacune avec une thématique et un protocole technique différent. On peut citer :
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Zoonoses (2022 - en cours), série d’étendards monumentaux en cyanotype, figurant des animaux sauvages dans une composition végétale de leurs milieux de vie et interrogeant sur l’augmentation des transmissions de maladies inter-espèces dû à l’anthropisation des écosystèmes ;
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Le Cri (2021 - en cours), série de photographies argentiques traitées et dégradées à la sève végétale et à la terre, documentant la construction de la Route Nationale 88 en Haute-Loire et la destruction de 140 hectares de terres agricoles, zones humides et forêts, et illustrant la lutte qui oppose habitant·es et agriculteurs·trices aux commanditaires ;
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Seeds of Anthropocene (2022 - en cours), recherche autour des procédés de projection d’image sur plantes en vue de la création d’une image par photosynthèse (dans les traces des travaux du duo Harvey & Ackroyd, d’Almudena Romero, ou d’Alice Cazenave)
En parallèle de ce travail de création, je transmets mes connaissances lors d’ateliers de médiation, de projets de territoires ou de workshops d’enseignement, auprès de publics variés : écoles du réseau prioritaire, quartiers classés politique de la ville, école supérieure de design, centres de loisirs, etc.
Ces ateliers sont conçus selon deux axes :
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L’enjeu de la découverte de techniques alternatives souvent méconnues par le grand public et permettant d’accéder facilement à des connaissances sur le fonctionnement d’un procédé photographique manuel, le végétal étant à la fois la technique de fabrication des photographies, et également leur objet d’étude ;
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Une réflexion sur les liens et les frictions entre urbanité et sauvage, la place du végétal dans la ville et dans ses marges, une approche environnementale, paysagère de l’acte photographique, et le lien qui unit les habitant·es à leur territoire.